Lumière dans
la nuit, de Kaazar, barde et druide
Depuis
quelques temps, les jours à SilverSky commençaient
à être sans saveurs. Certes, beaucoup
d'habitants étaient ravis de l'aide que je
pouvais leur apporter, l'humeur générale détendue
et courtoise mais quelque chose manquait,
quelque chose d'indéfinissable. Cette absence
rendait les découvertes et les succès mornes.
Le voile gris qui petit à petit m'enveloppait
l'esprit agissait comme le silence qui emplit la
nuit et la rend si froide et si impersonnelle.
Oui, une solitude oppressante me rongeait de
l'intérieur.
C'est
alors qu'au hasard des détours dans les ruelles
de la ville, mes sens furent attirés par un
spectacle presque mystique : une inconnue venait
d'apparaître dans un halo de lumière. Intrigué,
je m'en approchait et fus soudain foudroyé par
une vague de sentiments que je croyais disparus.
Dans ses yeux encore affolés par le nouvel
environnement, semblait se refléter l'océan en
entier et je manquai de m'y noyer. Ses gestes étaient
emplis d'une grâce si royale qu'ils
transformaient les mouvements de toute autre
personne en un chaos maladroit. Ce n'est qu'après
un long moment de béatitude que je réussis à
recouvrer l'usage de mon corps. Je m'approchai
d'elle essayant de masquer avec maladresse le
trouble de mon âme et me présentai.
J'essayai de ma voix de barde de trouver le ton
qui la rassurerait, le ton qui lui ferait poser
sur moi ses yeux dont l'intensité semblait
percer les mystères les plus profonds de l'âme.
Elle répondit à mes salutations et ma voix me
sembla tout à coup rocailleuse et laide tant la
mélodie qui emplissait l'air était subtile et
féerique.
La suite
de cette journée reste gravée dans mon esprit
comme le plus joyeux jour de ma vie ; je la
guidai dans cette ville pour elle inconnue, lui
faisant part de mes découvertes, de
commentaires sur la qualité de tel ou tel
marchand, des dangers du royaume à l'extérieur
des murailles et chacun de ses sourires, chacune
de ses paroles faisait bondir mon cœur de sa
prison de chair. En plus d'une beauté proche du
divin, elle était également femme d'esprit et
il était extatique d'échanger avec elle des
propos sur n'importe quel sujet tant ses répliques
étaient drôles et fines.
Quand
arriva l'heure des adieux, je ne pu retenir une
injure que je formulai mentalement à l'encontre
de Titania le sage, sur son choix de faire des
journées si courtes. C'est avec un déchirement
intérieur que je formulai des adieux et la
quittai. Mais en ce moment je savais... Je
savais quel était le trouble qui accaparait mon
esprit et j'étais heureux ... J'avais trouvé
la lumière dans ma nuit. Kaazar, barde druide.
|