Hier
soir, au coin d'un feu, je veillais en
compagnie de quelques habitants de Windhowl.
La nuit était douce, mais fraîche, et nous
devisions tranquillement autour d’une
gueuze, parlant de tout en particulier, et
de rien en général.
La conversation s’est portée un moment
sur les séraphins, que les habitants de
Windhowl regardent encore de loin, car notre
ville est sûrement la moins visitée de
tout le royaume. Et un vieillard m’a
raconté un conte que son propre grand-père
lui avait transmis dans son très jeune age,
il y a maintenant longtemps. Je vous en fais
part ici, car l’histoire est intéressante.
Au commencement était le Vide.
Le Vide ne fut que Néant.
Le Néant créa l’Absence.
L’Absence fit place au Manque.
Le Manque se cristallisa en Solitude.
La Solitude engendra la Tristesse.
Et la Tristesse poussa un Gémissement.
Le Cri se fit écho dans le Vide son aïeul,
le déchirant de sa douloureuse Existence.
Un Néant meurtri émit une double réponse.
Il y eu un Oui, il y eu un Non. Il y eu l’
Acceptation,
il y eu le Refus. Il y eu l’Amour, il y eu
la Haine. Il y eu Artherk, il y eu Ogrimar.
Et le Vide s’était mué en
l’Univers.
C’était un Univers discordant, où
Artherk tendait des bras compatissants vers
une Tristesse qu’Ogrimar rejetait en se
bouchant les oreilles. Pour faire cesser la
douleur de la création, le premier voulait
la consoler, le second voulait l’étouffer.
Artherk et Ogrimar se disputèrent,
s’opposant des solutions inconciliables.
Ainsi, le Grand Combat Universel
s’engageait. La guerre violente. Et
destructrice. Artherk et Ogrimar, dans leur
folle lutte, s’arrachèrent de fins
morceaux gémissants de leurs êtres déchirés;
jusqu’à ce que, las et fatigués, ils
cessent de se chamailler pour reprendre leur
souffle.
La Tristesse ouvrit des yeux humides sur
cette paix fragile, et entendit l’écho de
ses plaintes dans celles des lambeaux divins
que le combat avait abandonnés. Elle les
recueillit dans ses mains, et apaisa leur
douleur d’un soupir. Ainsi naquirent les Séraphins
: virevoltantes parcelles des deux Dieux,
animées du souffle de la Tristesse.
Car triste fut leur sort, funeste leur
destin. Nés d’une mésentente, ils ne
surent pas s’aimer; nés de la lutte, ils
ne surent que la prolonger. Et le Grand
Combat Universel reprit de plus belle.
Artherk et Ogrimar manipulaient des troupes
de séraphins obéissants, chair de leur
chair, sang de leur sang, douleur de leur
douleur.
Alors la Tristesse connut la Culpabilité.
Voulant attiser la paix, son souffle avait
ressuscité la guerre. Elle pleura. Deux
larmes de conscience vinrent à couler sur
l’Univers souffrant et déchiré, et elles
engendrèrent deux nouveaux frères. Les
deux Juges, arbitres du Grand Combat, étaient
nés.
Le premier Arbitre vint s’asseoir entre
les deux camps, et dit aux Séraphins :
Je suis l’Accord. J’approuve votre
combat et le légitime. Que luttent l’Ombre
et la Lumière, car leurs mouvements créent
la Vie. Mais que jamais l’une ne prenne
l’avantage sur l’autre, ou sinon naîtrait
le Chaos. De cet Équilibre je me porte
garant et juge. Qu’il en soit ainsi pour
les siècles et les siècles.
Alors le premier Arbitre leva la main, et créa
les Dragons, qui partout veillent à l’équité.
Le second Arbitre se dressa entre les
deux camps, et dit aux Séraphins :
Je suis le Désaccord. Je refuse votre
combat et le dénie. Que se séparent l’Ombre
et la Lumière, car leurs attaques créent
la Mort. Je sanctionne votre lutte, car vous
êtes coupables de l’entretenir. Soyez
mortels, car mortels vous craindrez vos
coups. Qu’il en soit ainsi pour les siècles
et les siècles.
Alors le second Arbitre, de sa main
vengeresse, balaya par trois fois le champ
de bataille, abattant les Séraphins et les
jetant à terre.
Ainsi furent déchus les Séraphins. Ainsi
naquirent les Elfes, les Nains et les
Humains. Ainsi débuta l’histoire
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